L’Hospice de France à Luchon

Un refuge pyrénéen chargé d’histoire au cœur des Pyrénées

À 1 385 mètres d’altitude dans les Pyrénées haut-garonnaises, l’Hospice de France constitue l’un des sites les plus emblématiques de Luchon. Cette auberge de montagne, autrefois appelée Hospice du Port de Vénasque, plonge ses racines dans huit siècles d’histoire, depuis l’époque des pèlerinages de Saint-Jacques-de-Compostelle jusqu’aux randonneurs d’aujourd’hui.

Les origines médiévales : l’oeuvre des hospitaliers

L’histoire de l’Hospice de France débute au début du xiiie siècle, dans le contexte des grands pèlerinages médiévaux. Le 25 mai 1200, une donation de Sanche Garsie d’Aure confirme la présence d’un Hospitali beati Johanni de Juheu au pied du port de la Glère, qui devait être en relation avec l’hospice de France.

L’ordre des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem a une commanderie hospitalière au lieu-dit Herontés, à Frontès, entre Montauban et Juzet-de-Luchon. L’objectif de ces moines-soldats était multiple : garder le passage vers la montagne, sécuriser ce chemin secondaire de Saint-Jacques-de-Compostelle et organiser des hospices pour les pèlerins et les commerçants qui risquaient leur vie lors des traversées hivernales.

Cependant, commence alors une lutte continue de plusieurs siècles entre les Hospitaliers et les populations guidées par leurs prêtres. L’objectif devint rapidement plus économique que religieux car il n’était pas question de partager les impôts. Cette tension constante entre l’ordre religieux et les communautés locales conduisit finalement à l’abandon de la région par les Hospitaliers.

La création du bâtiment de l’hospice du port de Vénasque date de cette époque et est la seule trace qui subsiste des Hospitaliers. En 1325, les comtes de Comminges auraient fait ouvrir le port de Vénasque pour faciliter le passage et éviter des droits de péage aranais au ravin de Terme.

L’évolution du nom et de la fonction

Pendant des siècles, l’établissement fut connu sous le nom d’Hospice du Port de Vénasque. La dénomination d’« Hospice de France » ne sera donnée qu’au xixe siècle. Cette appellation moderne reflète son rôle de dernier refuge français avant la frontière espagnole.

Aux alentours des années 1600 et 1700, loué par les consuls de Luchon à un fermier, l’établissement cumule les fonctions d’hospice montagnard, auberge, centre de perception et de change, objet de conflits intra et inter frontaliers. Cette polyvalence témoigne de l’importance stratégique du site dans les échanges transfrontaliers.

Les traités de Lies et passeries de Luchon prévoient les conditions de passage et d’exploitation des pâturages pour les troupeaux commingeois aussi bien qu’aranais. Ces accords anciens régissaient la vie économique de part et d’autre de la frontière pyrénéenne.

L’âge d’or du Pyrénéisme (xixexxe siècles)

Avec l’ouverture d’une voie carrossable depuis Luchon en 1858, à la grande époque des débuts du pyrénéisme, la compagnie des guides de Luchon — une des seules compagnies à cheval — en faisait le but d’une promenade à quelques heures de Luchon et un départ d’excursions plus prestigieuses vers la Maladeta et l’Aneto.

L’Hospice de France devient alors une étape incontournable pour les alpinistes et les excursionnistes. L’auberge était un passage obligé pour soigner les chevaux au retour des expéditions. Cette fonction logistique était cruciale à une époque où les expéditions en haute montagne nécessitaient des moyens de transport particuliers.

Le succès de l’Hospice de France est constant depuis le xixe siècle et dans la première moitié du xxe. De nombreuses personnalités viennent y séjourner. Parmi ces hôtes illustres, on compte l’impératrice Eugénie, qui a même laissé son nom au chemin menant au Cirque de la Glère.

Ce serait le président Vincent Auriol qui aurait fait classer la route, jusqu’au port de Vénasque, comme nationale (N 125). Cette reconnaissance officielle souligne l’importance stratégique et touristique du site.

L’époque d’Odon Haurillon et les années sombres

En 1938, la vieille auberge de montagne, rajeunie, devient l’Hostellerie de l’Hospice de France, sous la direction du guide, professeur de ski, passeur durant la guerre, Odon Haurillon. Cette figure emblématique marque profondément l’histoire moderne du site.

Odon Haurillon transforme l’hospice en une destination renommée. Elle devient alors célèbre pour son accueil, sa gastronomie, mais aussi pour ses 2 oursons, capturés par le maître des lieux en mai 1952, qui faisaient l’attraction des clients. Ces détails pittoresques témoignent de l’atmosphère unique qui régnait alors dans l’établissement.

Cependant, les difficultés s’accumulent progressivement. Fermée l’hiver, l’hôtellerie perd peu à peu son attrait. En 1976, la route est coupée par un éboulement, et Odon Haurillon meurt en 1978. Cette période marque la fin d’une époque glorieuse pour l’Hospice de France.

Ce n’est qu’en 1988 qu’une nouvelle route, sur l’autre versant de la vallée est aménagée, la configuration géologique du terrain ne permettant pas l’utilisation de l’ancien tracé. Cette nouvelle infrastructure présente toutefois des contraintes importantes : traversant de nombreux couloirs d’avalanche, cette route est fermée l’hiver. L’accès ne se fait alors qu’à pied par l’ancien chemin.

La renaissance contemporaine

La restauration de l’auberge et sa réouverture datent de 2009. Cette renaissance marque le retour de l’Hospice de France sur la scène touristique pyrénéenne. Niché dans un cadre enchanteur à 1 385 mètres d’altitude, sur les hauteurs de Luchon, notre auberge vous accueille pour une escapade inoubliable au cœur des Pyrénées haut-garonnaises.

L’établissement offre un hébergement chaleureux et confortable, alliant authenticité et modernité. Construit en respectant l’architecture traditionnelle pyrénéenne, notre gîte est doté de tout le confort moderne pour vous garantir un séjour agréable.

L’Hospice moderne propose une offre gastronomique valorisant les produits locaux. Ouvert de 12h00 à 15h00, le restaurant de l’Hospice de France sert une cuisine traditionnelle et savoureuse, mettant en valeur les produits locaux : charcuteries régionales, truites bio, viandes de producteurs locaux, légumes bio, fromages des Pyrénées.

L’été, une navette permet d’accéder au site depuis le centre de Luchon ou l’Espagne, de manière à faciliter le retour depuis l’un ou l’autre versant. Cette desserte moderne facilite l’accès tout en préservant l’authenticité du site.

Un point de départ privilégié pour la randonnée

L’Hospice de France reste un site naturel privilégié, point de départ de nombreuses ascensions aux niveaux variés. Sa position stratégique en fait un camp de base idéal pour explorer les plus beaux sommets des Pyrénées centrales.

La randonnée la plus célèbre mène au Port de Vénasque (2 444 m), passage frontalier historique avec l’Espagne. Par la vallée de la Pique, au terme de nombreux lacets, on atteint les Boums (lacs), le refuge de Vénasque, puis le port de Vénasque. Cette ascension de trois heures offre des panoramas exceptionnels sur le massif de la Maladeta et l’Aneto, point culminant des Pyrénées (3 404 m).

Les randonneurs peuvent également emprunter le sentier de l’Impératrice, sentier pratiquement horizontal, créé au xixe siècle pour un passage de l’impératrice Eugénie. Ce chemin permet d’atteindre le cirque de la Glère dans un cadre forestier préservé.

Pour les alpinistes confirmés, l’Hospice de France constitue le point de départ d’ascensions prestigieuses vers les pics de Sauvegarde (2 738 m), de la Mine (2 708 m), ou encore vers les sommets du massif de la Maladeta.

Un défi cycliste réputé

L’Hospice de France constitue également une montée cycliste redoutable qui attire les amateurs de défis sportifs. Cette montée mesure 11,8 kilomètres, pour un dénivelé positif de 748 mètres. Hospice de France depuis Luchon a une pente moyenne de 6,3 %.

Les cyclistes affrontent des passages particulièrement exigeants dans la partie finale. Les 3 derniers kilomètres sont par contre effrayants, avec une moyenne de plus de 12 % et des passages à 15 % et plus. Cette difficulté en fait une ascension de première catégorie, comparable aux grands cols du Tour de France.

Malgré sa difficulté, ou peut-être à cause d’elle, cette montée reste relativement méconnue du grand public cycliste. Le point de vue au sommet, dans un site exceptionnel, est tout simplement sublime, offrant une récompense méritée aux courageux qui atteignent l’hospice à la force de leurs jambes.

Un patrimoine historique préservé

Au-delà de sa fonction d’hébergement et de restauration, l’Hospice de France abrite un petit musée qui retrace l’histoire du lieu. Un petit musée présente l’histoire du lieu, des hôpitaux au pied des cols pyrénéens et les débuts du pyrénéisme. Cette dimension culturelle enrichit la visite et permet de mieux comprendre huit siècles d’histoire pyrénéenne.

Le site témoigne de la continuité des échanges transfrontaliers à travers les âges. Depuis les pèlerins médiévaux jusqu’aux randonneurs contemporains, en passant par les commerçants, les contrebandiers, les alpinistes pionniers et les réfugiés des guerres du xxe siècle, l’Hospice de France a toujours été un lieu de passage et de rencontre.

Cette continuité historique confère au site une dimension symbolique particulière. L’Hospice de France incarne l’âme des Pyrénées : un espace de liberté où les frontières s’estompent face à la grandeur de la montagne, où l’hospitalité montagnarde transcende les nationalités et les époques.

L’Hospice de France à Luchon représente bien plus qu’une simple auberge de montagne. C’est un condensé de l’histoire pyrénéenne, un témoin privilégié des échanges entre la France et l’Espagne, et un symbole de l’hospitalité montagnarde. Que l’on soit randonneur, cycliste, amateur d’histoire ou simple amoureux de la montagne, ce lieu unique offre une expérience authentique au cœur des Pyrénées. Huit siècles après sa création par les Hospitaliers, l’Hospice de France perpétue sa mission première : accueillir et protéger ceux qui bravent les chemins de montagne.